Aller dans les Pouilles en train depuis Paris
Les Pouilles, avec leurs charmants villages blancs, Bari, encore méconnue, et Lecce, joyau architectural, sont devenues très prisées des touristes. Après les avoir découvertes en 2018, j’ai voulu y retourner. Plutôt que de prendre un vol low cost, j’ai choisi d’y aller en train. Ce furent 26 heures de plaisir à tous points de vue !
Mon voyage en train depuis Paris à Lecce dans les Pouilles italiennes
Les Pouilles sont l’une des régions d’Italie dont la popularité a explosé ces dernières années auprès des voyageurs français. Je les avais découvertes lors d’un premier voyage en 2018 et j’avais envie d’y retourner. Avec leurs charmants villages aux maisons blanches, Bari, cette ville encore méconnue, et Lecce, véritable joyau architectural, les Pouilles ne manquent pas d’atouts. Sans oublier leur gastronomie pleine de saveurs !
Bien sûr, il est facile de s’y rendre en un peu plus de deux heures de vol depuis la France, avec une compagnie low cost. Mais j’ai voulu tenter une approche différente, plus amusante et plus immersive, qui m’offrirait la chance de prendre un train de nuit, la quintessence du voyage selon moi !
Je vous propose donc de suivre le récit de mon périple, en espérant qu’il vous convaincra que cette alternative à l’avion est un véritable bon plan.
Le voyage, d’une durée totale de 26 heures, pourrait paraître décourageant à première vue. Mais le fondement même de cette expérience est de transformer ce temps en moments de vie, de découverte et de plaisir.
Mon itinéraire se déroulera en trois grandes étapes via Zurich et Milan.
Je débuterai par un départ matinal de Paris pour rejoindre Zurich en quatre heures. Après une correspondance d’une heure, je poursuivrai mon trajet vers Milan, traversant les Alpes et admirant des paysages époustouflants. J’arriverai à Milan en fin d’après-midi, et je n’en repartirai qu’en soirée, ce qui me laissera suffisamment de temps pour me promener, dîner, et même faire un saut à la piscine ! Enfin, la dernière étape de mon voyage sera une longue nuit en voiture-lits, me permettant d’arriver reposé à ma destination finale : Lecce.
Tous les textes en couleur corail indiquent un lien interne ou externe que je vous invite à cliquer.
L’élégante Gare de Lyon à Paris
Mon train étant prévu pour 7 h 22, c’est aux aurores que je me lève pour mon grand voyage jusqu’à Lecce.
La Gare de Lyon fut construite juste à temps pour l’exposition universelle de 1900. Elle est facilement reconnaissable grâce à son élégante tour de l’horloge de 62 mètres de haut, dessinée par Garnier, l’architecte de l’Opéra qui porte son nom à Paris.
Une gare complexe, mais élégante
Aujourd’hui, elle est l’une des plus importantes de Paris, mais aussi l’une des plus compliquées.
J’arrive de chez moi en métro par la partie la moins attrayante, située au sous-sol. Dans une effroyable complexité de dédales de couloirs et de halls sur plusieurs niveaux se trouvent de nombreuses lignes de métro, des trains de banlieue et le RER. Les habitués se faufilent le long de leur itinéraire bien balisé et connu seulement d’eux-mêmes. Les provinciaux et les étrangers, débarquant de leur TGV, essayent de comprendre, au milieu d’une foule compacte, comment acheter leur billet et ensuite rallier leur moyen de transport pour atteindre leur destination finale.
Un peu par hasard, je débouche au hall 2, avec sa verrière moderne et lumineuse, symbole du XXIe siècle, d’où partent la majorité des TGV, fierté nationale de la France. Le panneau d’affichage m’indique que mon train pour Zurich part du hall 1, que je rejoins en passant par la grande salle des fresques, magnifiquement rénovée. Je l’ai connue, sombre, avec ses guichets où d’interminables files d’attente se formaient pour acheter un billet de train auprès d’un employé caché derrière son hygiaphone !
Aujourd’hui, elle abrite quelques boutiques de luxe, l’espace de vente de la SNCF et son salon VIP pour les voyageurs fréquents. Mon regard est attiré par la superbe longue fresque peinte qui représente les différentes destinations de l’ancienne prestigieuse compagnie PLM (Paris-Lyon-Méditerranée).
Le restaurant étoilé du Train Bleu
Au bout de la salle des fresques, je me retrouve dans l’immense hall 1 avec sa verrière d’origine. Sur la façade côté rue, je vois un grand escalier à double révolution qui conduit au restaurant du Train Bleu. À cette heure matinale, il est encore fermé, mais par la porte vitrée, je peux admirer la splendide décoration des années 1900. Il m’est facile d’imaginer l’époque où une clientèle chic venait dîner avant de regagner sa luxueuse voiture-lit à destination de Nice, Rome ou Venise.
Mais il est temps de rejoindre mon TGV pour Zurich.
En route pour Zurich à bord du TGV Lyria
Mon TGV arbore une belle livrée blanche, grise et rouge. Lyria est une joint-venture entre les chemins de fer français, la SNCF, et les chemins de fer suisses, les CFF. J’aime bien ce nom, qui a une jolie sonorité, un peu comme l’avait la défunte marque Thalys.
Je voyage en classe Standard Première
Je voyage en Standard Première classe, à l’étage supérieur de la rame en duplex. Je ne suis pas dépaysé, car les fauteuils et l’harmonie sont très similaires à ceux des TGV domestiques de la SNCF. Le confort et l’espace personnel sont très satisfaisants.
Ce jour-là, notre TGV est plein. Nous sommes le lendemain de la cérémonie de clôture des Jeux olympiques de Paris, et les supporters suisses sont nombreux à retourner chez eux.
Comme sur l’Eurostar (anciennement Thalys), j’aurais pu choisir de voyager en classe Business Première. J’aurais bénéficié d’un petit déjeuner qui, d’après les photos publicitaires, semble appétissant. Mais j’aurais dû débourser une centaine d’euros supplémentaires pour un fauteuil au confort identique. Un peu cher, le petit-déjeuner ! À la place, je décide d’apporter quelques viennoiseries achetées à ma boulangerie préférée près de chez moi et de me rendre au bar, situé au centre de la rame, pour prendre un expresso.
Je jette aussi un coup d’oeil à la classe Standard qui est aussi bien pleine.
Notre TGV file sur la ligne à grande vitesse Paris-Lyon, que nous quittons juste avant d’atteindre Dijon. L’itinéraire jusqu’à Zurich alterne entre des tronçons à grande vitesse et des voies classiques, ce qui explique pourquoi nous mettons 4 heures, contre 2 h 40 pour aller à Avignon, qui est à une distance similaire depuis Paris.
Une heure trente après notre départ, nous arrivons à Dijon, que nous ne faisons que traverser. Jusqu’au début des années 80, c’était une gare stratégique entre Paris et Lyon, mais avec la nouvelle ligne TGV passant un peu plus à l’ouest sur un trajet plus direct, elle a perdu ce rôle. Les dix quais semblent disproportionnés par rapport au trafic actuel.
Après Dijon, nous reprenons de l’allure jusqu’à Belfort, sur la seconde ligne à grande vitesse de notre parcours, à travers une vaste plaine plutôt monotone. Ce n’est qu’entre Belfort et Mulhouse que le paysage devient plus intéressant, avec au loin les montagnes des Vosges.
Un passage de frontière sans souci
Bien que la Suisse ne fasse pas partie de l’Union européenne, elle a intégré l’espace Schengen, et nous passons donc la frontière avant Bâle sans même nous en apercevoir. C’est un grand bénéfice de la construction européenne, que nous avons un peu tendance à oublier. Lorsque je travaillais dans les trains de nuit dans les années 80, les contrôles aux frontières étaient systématiques et prenaient pas mal de temps.
C’est à petite vitesse, mais parfaitement à l’heure que nous atteignons Zurich. Comme le proclame fièrement le site internet de Lyria, c’est la grande vitesse des chemins de fer français alliée à la ponctualité des chemins de fer suisses. Le meilleur des deux prestigieuses compagnies !
Une heure pour humer l’air de la vieille ville de Zurich !
Ma correspondance entre les deux trains dure un peu plus d’une heure. C’est suffisant pour me permettre une petite promenade à travers la vieille ville jusqu’au lac de Zurich.
La vieille ville, avec ses petites ruelles pavées sans voitures, est charmante. Je suis étonné par la profusion de drapeaux suisses, que je trouve excessive ! Bien que Zurich soit plutôt une destination d’affaires, je suis frappé par le grand nombre de touristes qui déambulent.
Une piscine flottante réservée aux femmes !
Je longe la rivière Limmat. Elle prend sa source dans le lac de Zurich puis rejoint la rivière Aare, qui elle-même se jette dans le Rhin. Voyager, c’est aussi être curieux sur la géographie ! Je passe à côté de la Frauenbad Stadthausquai, une piscine flottante en bois, construite à la fin du XIXe siècle. Il fait très chaud et je suis bien tenté de m’arrêter pour un rapide plongeon… mais l’entrée est réservée uniquement aux femmes ! Cette singularité s’explique par le fait qu’au XIXe siècle, les femmes n’avaient aucun endroit à Zurich pour se baigner en toute tranquillité.
Mon heure de promenade passe vite et il est temps de retourner à la gare.
La gare de Zürich Hauptbahnhof
La gare Centrale de Zurich date de 1871 et est construite dans un style néo-renaissance. Elle est remarquablement bien située au cœur de la ville, au bout de la bien nommée Bahnhofstrasse, l’artère commerciale principale avec de nombreuses boutiques de luxe.
On entre dans la gare par un hall monumental, récemment rénové. La pièce maîtresse est la sculpture de Niki de Saint Phalle, « l’Ange protecteur ».
La gare abrite également un grand centre commercial, Shopville, situé au sous-sol avec 180 magasins de toutes sortes. C’est le seul endroit de Zurich où il est possible de faire ses courses en soirée, le dimanche et les jours fériés, car les autres commerces de la ville sont soumis à des horaires d’ouverture très stricts.
Mon train étant à quai, je le rejoins immédiatement.
Zurich-Milan avec Trenitalia par l’ancien tunnel du Saint-Gothard
La ligne Zurich-Milan est opérée conjointement par les chemins de fer suisses (CFF) et italiens (Trenitalia). Il y a presque un train par heure !
Le tunnel de base du Saint-Gothard : une prouesse technologique
Depuis 2016, le trajet entre ces deux villes ne dure plus que 3 h 17 grâce à l’inauguration du tunnel de base du Saint-Gothard, qui cumule les superlatifs. Avec ses 57 km, il est le tunnel le plus long du monde, surpassant le tunnel sous la Manche, qui mesure « seulement » 50 km. Il est également le plus profond, passant sous une couche de granit de 2450 m, sous le sommet du Piz Vatgira. Les trains traversent ce tunnel en moins de 20 minutes, à une vitesse maximale de 250 km/h. Cet ouvrage a nécessité 12 milliards de francs suisses et 20 ans de travaux !
Cependant, en août 2024, je ne peux pas emprunter ce tunnel, car il est fermé au trafic voyageur suite au déraillement d’un train de marchandises qui l’a gravement endommagé un an auparavant. Mon train devra donc passer par l’ancien tunnel du Saint-Gothard, bien plus court et situé à une altitude plus élevée. Long de seulement 15 km, il culmine à 1150 m, contre 500 m pour le nouveau tunnel. Mon trajet prendra une heure de plus, mais il me permettra d’admirer des paysages exceptionnels que l’on ne voit plus en voyageant dans le tunnel de base.
À bord du train italien pendulaire
La majorité des trajets sont assurés par des trains Giruno des chemins de fer suisses, mais aujourd’hui, je voyage dans un train italien. C’est un ETR610 à technologie pendulaire qui permet d’aller plus vite sur des voies classiques. La livrée extérieure, à dominante grise argentée, soulignée de touches de rouge et de vert, est très élégante.
Je continue mon voyage en Première classe. Ma première impression n’est pas très bonne. L’harmonie cabine, très grise, est plutôt triste. Je ne suis pas fan des fauteuils en cuir, trop chauds en été et trop froids en hiver. Enfin, le sol est en lino et non en moquette, ce qui fait très « cheap ».
Je regrette presque de ne pas avoir acheté un billet en seconde classe dont le fauteuil avec un joli tissu bleu semble plus confortable bien que plus étroit.
Le lac de Zurich
Suisse oblige, notre train part parfaitement à l’heure. Après avoir emprunté un tunnel, nous débouchons le long du lac de Zurich. Celui-ci est long de 42 km, mais large de seulement 3 km, et il a la forme d’une banane. Autour de Zurich, les rives sont très urbanisées avec de jolies maisons et petits immeubles qui offrent tous de superbes vues. La présence de l’eau fait de cette ville l’une des plus plaisantes d’Europe pour la qualité de vie.
Le lac de Zoug et la jolie ville d’Arth puis le lac de Lucerne
Après une quinzaine de kilomètres, nous bifurquons vers le sud en direction du lac de Zoug. Il a un aspect plus campagnard, avec de belles demeures au bord de l’eau.
En arrivant à son extrémité sud, nous passons à côté de la petite ville d’Arth, située dans un cadre exceptionnel, avec en arrière-plan la montagne du Rigi. C’est tout à fait l’image d’Épinal de la Suisse !
C’est à ce moment que je décide de me rendre à la voiture-bistro. Je suis un peu déçu, car elle ressemble plus à une banale cafétéria qu’à un restaurant. Mon déjeuner se limitera à un panini et un expresso. Si j’avais pris un train suisse, j’aurais eu un vrai repas servi à ma place. Dommage !
C’est l’heure de la sieste. Certains voyageurs se laissent bercer par le train.
Nous passons ensuite près du lac de Lucerne. Magnifique !
La voie vers l’ancien tunnel du Saint-Gothard est un régal pour les yeux
À Erstfeld, nous aurions dû rejoindre le tunnel de base du Saint-Gothard, mais nous bifurquons à droite pour monter dans la montagne jusqu’à l’ancien tunnel. Nous mettrons une heure de plus, mais c’est un régal pour les yeux avec les villages surplombés par les montagnes.
Pour atteindre l’altitude de 1150 m, la voie de chemin de fer effectue plusieurs boucles de 360°, car sinon la pente serait trop raide.
Après le tunnel, nous redescendons vers Lugano. Nous longeons l’autoroute, qui a aussi son tunnel du Saint-Gothard. En attendant la construction d’un deuxième tube, prévu pour 2032, le trafic est bidirectionnel. Pour limiter les risques d’accident, la vitesse est limitée à 80 km/h et la distance de sécurité entre les véhicules est allongée, ce qui provoque d’énormes embouteillages, comme je peux le voir depuis ma fenêtre. Vive le train !
Lugano : la Suisse italienne
Lugano ! S’il y a une étape à prévoir entre Zurich et Milan, c’est ici. Le lac, avec sa forme tortueuse, offre des paysages exceptionnels. Nous sommes toujours en Suisse, mais dans la partie italophone, et on retrouve l’élégante architecture des villas des célèbres lacs italiens. Lugano est à la fois le troisième pôle financier de la Suisse après Zurich et Genève, mais aussi une ville touristique prisée pour la douceur de son climat. N’ayant pas prévu d’arrêt, je me contenterai des vues depuis mon train de cette magnifique région.
Nous traversons le Tessin viticole, réputé pour son merlot.
L’Italie et la plaine du Pô
Nous atteignons Chiasso, la ville frontière. Le personnel de bord suisse cède la place à leurs homologues italiens. Puis nous passons près de la ville de Côme.
Nous ne sommes plus très loin de Milan, et nous quittons les Alpes pour filer dans la grande plaine du Pô.
Nous arrivons à l’heure programmée, soit 16 h 50, après 4 h 15 de trajet.
Comment s’occuper pendant cinq heures à Milan ?
J’ai cinq heures de correspondance avant mon train de nuit pour Lecce. Après avoir mis mon sac à la consigne, j’enfourche l’un des vélos en libre-service de la ville pour aller dans le cœur de Milan, autour du Duomo.
Commencer par une glace italienne !
Ma première étape est chez le glacier Grom, l’un des plus réputés de Milan. Il faut faire un peu la queue avant d’être servi, mais cela vaut le coup, d’autant plus que la chaleur est étouffante avec plus de 35 °C à l’ombre !
La Galerie Vittorio Emanuele II et le Duomo : des splendeurs uniques
Je me rends ensuite à la Galerie Vittorio Emanuele II pour admirer sa splendide verrière.
Puis je débouche sur la place du Duomo, où trône la cathédrale de Milan. Dans la lumière de fin de journée, sa façade en marbre blanc est magnifiquement mise en valeur.
Je continue ma balade dans les nombreuses boutiques environnantes pour profiter de la fraîcheur de la climatisation et découvrir les dernières tendances de la mode.
Pourquoi pas aller à la piscine ?
Il fait vraiment chaud et je sais que je ne pourrai ni prendre de douche à la gare, ni dans mon train. Par chance, je trouve une piscine municipale pas très loin : la piscine Cozzi. Son architecture des années 30 lui donne un air rétro, et c’est avec délice que je plonge dans le bassin à la température bien fraîche ! Elle est historique, car lors de son ouverture en 1934, elle fut la première piscine entièrement couverte en Italie.
Finir par une bonne pizza !
Avant de rejoindre mon train, je m’installe pour manger une pizza dans une trattoria de quartier, l’une de celles qui pullulent autour de la gare. Le plaisir de bien se nourrir simplement, voilà ce qui fait le charme de l’Italie !
La gare Centrale de Milan, d’architecture mussolinienne
La gare a été inaugurée en 1931, alors que Mussolini était au pouvoir. Il fallait que la gare soit monumentale pour célébrer la grandeur de la puissance fasciste.
En arrivant un peu plus tôt depuis Zurich, j’avais été impressionné par les abords de la gare Centrale et sa multitude de voies. Le bâtiment appelé « Cabina A », autrefois utilisé pour la gestion des aiguillages continue à en imposer !
Les 24 quais de la gare sont recouverts non pas par une seule verrière, mais par cinq ! J’observe particulièrement les structures en fer forgé, qui sont remarquables.
Un style grandiloquent
Ensuite, je pénètre dans la gare elle-même. Son style est indéfinissable, entre influences Art déco et réminiscences de la Rome antique. Cela me fait penser aux thermes de Caracalla ! En tout cas, malgré la foule, on se sent minuscule sous ce plafond qui culmine à plus de 70 mètres de hauteur. Dommage que les nombreux panneaux publicitaires gâchent un peu l’architecture, qui est exceptionnelle par son gigantisme.
Un mémorial de la Shoah
Juste à côté de la gare se trouve un mémorial de la Shoah : le quai 21, situé au sous-sol, bien caché. C’est de là que sont partis des Juifs dans des trains de marchandises en direction des camps de concentration allemands.
Nous sommes maintenant en soirée, après ma petite escapade milanaise. Je retourne à la gare. De nuit, la façade extérieure est tout aussi impressionnante, mais davantage par sa taille que par son élégance.
Milan-Lecce avec l’Intercity Notte de Trenitalia
Les chemins de fer italiens, Trenitalia, ont conservé un réseau de trains de nuit important, avec plusieurs liaisons depuis le nord de l’Italie vers la Sicile et les Pouilles. Ces trains sont commercialisés sous la marque Intercity Notte.
Une foule immense se précipite vers le quai 16 lorsque notre train arrive en gare, seulement cinq minutes avant son départ prévu à 21 h 50. Mes compagnons de voyage sont principalement des jeunes ou des familles. Nous sommes au milieu de l’été, et je m’attends à ce que notre train soit bien plein.
Voyage en voitures-lits : la classe « Deluxe »
Je voyage en classe « Deluxe », qui est la dénomination pour le confort des voitures-lits. Ma voiture semble dater d’un certain temps, rappelant étrangement celles où je travaillais dans les années 80, soit quarante ans en arrière !
Les compartiments peuvent accueillir de une à trois personnes mais qui doivent voyager ensemble. Autrement dit, étant seul, j’ai dû acheter une cabine single et non juste un lit dans une cabine à partager avec un ou deux inconnus comme il était possible autrefois.
La décoration de ma cabine est assez froide et rappelle celle d’un hôpital. C’est dommage que, comme sur mon trajet Zurich-Milan, Trenitalia n’ait pas fait plus d’efforts pour donner une ambiance plus chaleureuse à ses trains. Au sol, je retrouve un lino plutôt qu’une moquette, qui serait plus agréable.
La cabine est équipée d’un lavabo, mais les toilettes sont au bout d’un sinistre couloir, ce qui n’est pas ni pratique ni agréable en cas d’envie pressante en pleine nuit.
Heureusement, j’ai pris une douche avant de monter à bord, car il n’y en a pas dans le train, contrairement aux Nightjets des chemins de fer autrichiens, que j’ai déjà emprunté comme je le raconte dans mes articles sur les trajets Paris-Vienne et Hambourg-Innsbruck.
Le service est assuré par la société Polaris Elior, et un steward est affecté à ma voiture. Peu après mon installation, il vient m’offrir une boîte confort très basique, ainsi qu’un questionnaire pour choisir mon petit-déjeuner. Il me montre un bouton d’appel, mais en précisant bien qu’il est réservé aux urgences. Il ne faudrait pas que je dérange son sommeil pour des futilités !
Voyager en classe « Comfort » ou « Basic »
Avant le départ, je prends le temps d’explorer les deux autres classes proposées par Trenitalia.
Tout d’abord, la classe « Comfort », qui offre des compartiments de quatre couchettes. Ces voitures sont plus récentes que celles de la classe « Deluxe » et semblent offrir un bon compromis entre confort et prix.
Ensuite, je découvre la classe « Basic », dont le nom est bien choisi : le confort est vraiment minimal ! Les passagers y sont installés sur des ensembles de quatre sièges, disposés en face-à-face par paires. Bien que les fauteuils paraissent moelleux, leur inclinaison est faible, et il faut composer avec les jambes de son voisin. Passer une nuit dans ces conditions doit être peu reposant.
Nous partons avec plus de 40 minutes de retard, pour une raison inconnue. Mais c’est la magie des trains de nuit : malgré tout, nous serons à l’heure le lendemain matin dans les Pouilles.
Après ma longue journée de voyage depuis Paris, je m’endors comme un bébé. Le train est bien insonorisé, la literie est confortable, et la climatisation fonctionne parfaitement. Ma nuit est excellente.
Réveil dans les Pouilles
Au petit matin, je me réveille en douceur. Il est 7 h 44, et nous venons de quitter Bari. Avant d’arriver à notre destination finale, Lecce, nous allons marquer plusieurs arrêts dans des villes des Pouilles, toutes dignes d’une visite.
Bari : la Naples des Pouilles
Bari est surtout connue comme la porte d’entrée pour les touristes qui se rendent vers les plages des Pouilles en avion. En levant le rideau, j’aperçois d’ailleurs un avion de Transavia en phase d’approche.
Pourtant, Bari mérite une visite à part entière pour son centre historique et ses ruelles tortueuses pleines de charme. Son atmosphère portuaire m’avait un peu rappelé Naples lorsque je l’ai visité pour la première fois il y a quelques années.
Pour les Européens du nord, la basilique Saint-Nicolas est un passage obligé, car elle abrite les reliques de Saint-Nicolas, ce même saint qui, chaque décembre, offre des cadeaux aux enfants sages.
Mon steward m’apporte mon petit-déjeuner. Il est composé uniquement de produits industriels sous sachet, sans grande saveur, mais heureusement, le cappuccino est excellent. Les voitures-lits italiennes sont équipées d’une véritable machine à expresso.
Nous longeons de vastes champs d’oliviers qui s’étendent à perte de vue. Le train file à bonne allure sur une voie parfaitement droite, caractéristique de la région des Pouilles, aussi plate que les Pays-Bas.
Polignano a Mare et Monopoli
Une demi-heure après Bari, notre prochain arrêt est Polignano a Mare, une charmante cité balnéaire aux maisons perchées sur des falaises. Sa plage principale se trouve au fond d’une calanque rocheuse spectaculaire, et de nombreuses grottes sous-marines sont accessibles à la nage ou en bateau.
Dix minutes plus tard, nous nous arrêtons à Monopoli, une autre ville balnéaire au joli port de pêche, très photogénique.
Alberobello et Ostuni
Notre arrêt suivant est Fasano, situé à proximité de certains des villages les plus célèbres des Pouilles. Alberobello est mondialement connue pour ses trulli, ces maisons en pierre aux toits coniques, qui évoquent un peu un village de Schtroumpfs ! Les villages de Locorotondo, Martina Franca, et Cisternino sont tout aussi charmants, avec leurs petites maisons blanches nichées au milieu des oliveraies.
À 8 h 39, nous arrivons à Ostuni. Perchée sur une colline, cette vieille ville est l’une des plus remarquables des Pouilles, offrant de magnifiques vues sur la côte Adriatique. Nous sommes désormais dans le Salento, la région sud des Pouilles, qui forme le talon de la botte italienne.
Brindisi : le port pour aller en Grèce
À 9 h 5, nous marquons notre dernier arrêt avant Lecce à Brindisi. Moins touristique, cette ville est surtout une porte d’entrée des Pouilles, avec son aéroport et son port qui propose de nombreuses liaisons vers la Grèce.
Entre Brindisi et Lecce, j’observe que les oliveraies semblent en moins bon état. Beaucoup d’arbres paraissent morts, victimes de la bactérie Xylella fastidiosa, qui assèche les oliviers depuis 2013, causant la mort de plus de 21 millions d’arbres. Cette épidémie, difficilement contrôlable, est un sujet de préoccupation majeure pour la région.
Reporterre en français et The Guardian en anglais détaillent bien cette situation inquiétante.
Lecce : la Florence du sud
Il est 9 h 30, et nous arrivons à la gare de Lecce pile à l’heure de notre destination finale ! La petite gare est déjà assommée par le soleil. Il est prévu qu’il fasse 38 °C dans l’après-midi !
Lecce est une ville magnifique, souvent surnommée la Florence du sud, grâce à ses nombreuses églises et palais de style baroque. La ville doit son charme à la pierre de Lecce, qui lui confère une teinte dorée, resplendissant aussi bien en plein soleil que sous les lumières nocturnes. C’est un vrai plaisir d’y déambuler.
Paris-Lecce en 26 heures
Il m’a fallu 26 heures pour parcourir Paris-Lecce, et je ne le regrette absolument pas !
Un voyage reposant et sans stress
Grâce à une bonne nuit de sommeil en voiture-lit, et mon choix de voyager en Première classe je suis arrivé frais et dispo à Lecce, malgré la longueur du voyage.
J’avais prévu des temps de correspondance suffisamment longs pour éviter le stress en cas de retard.
Un voyage passionant sur le plan touristique
Comme mon voyage s’est bien déroulé j’ai même pu profiter d’agréables balades dans le centre de Zurich et Milan.
J’ai apprécié la découverte des gares sur mon trajet, toutes chargées d’histoire et d’une grande richesse architecturale.
Les paysages montagneux entre Zurich et Milan étaient absolument magnifiques.
Un regrettable manque de coordination entre les compagnies ferroviaires européennes
Il est cependant dommage que les compagnies ferroviaires collaborent si peu entre elles. L’organisation de ce voyage m’a pris du temps, car chaque compagnie a ses propres règles tarifaires. Par exemple, pour le trajet Zurich-Milan, il est possible d’acheter son billet soit via Trenitalia, soit via les CFF, mais le tarif est plus avantageux avec Trenitalia et on peut choisir sa place sur un plan.
Comme pour mon voyage en train de Paris à Stockholm, il est illusoire de compter sur les compagnies ferroviaires pour faciliter l’organisation, la réservation et l’achat du billet. J’ai du me débrouiller par moi-même.
A la découverte de la superbe région des Pouilles
Maintenant il ne me reste plus qu’à découvrir Les Pouilles qui est une région attachante de l’Italie ! J’écrirai un article dans l’avenir pour mieux vous la présenter.
Conseils pratiques pour votre voyage en train entre la France et les Pouilles
Réserver ses trains
Où faire ses réservations de train ?
- Train Paris Zurich avec Lyria : SNCF de préférence ou CFF
- Train Zurich Milan : Trenitalia de préférence ou CFF
- Train Milan Lecce : Trenitalia
Les offices du tourisme
L’office du tourisme à Zurich :
Par rapport à d’autres pays que j’ai visité j’ai trouvé que les sites italiens sont plutôt moins bien faits.
Je vous invite cependant à les visiter avant de partir pour être au courant de l’actualité locale.
La météo !
Lors de mon voyage en août j’ai eu très chaud ! Je vous conseille de le faire plutôt en juin ou en septembre. De plus les Pouilles seront moins fréquentées.
- Meteofrance en France
- Meteosuisse en Suisse
- Meteo.it en Italie
Se loger
La région des Pouilles étant très tourisique il est très facile de se loger avec une offre hôtelière ou chez l’habitant très importante et diversifiée.
Combien cela m’a coûté ?
J’ai fait le voyage seul et j’ai réservé plusieurs semaines à l’avance. J’ai choisi les tarifs les plus bas mais non remboursables et non modifiables. C’est pourquoi j’ai pris soin de choisir des temps de correspondance confortables, car en cas de retard, j’aurais perdu mon billet et dû en acheter un autre au prix fort.
- Paris Zurich en Standard Première : 73 EUR
- Zurich Milan en Première : 76 EUR
- Milan Lecce en voiture-lit single : 127 EUR
J’ai économisé une nuit d’hôtel à Lecce qui, au mois d’août, m’aurait coûté environ 150 à 200 EUR.
Si j’avais voulu voyager de manière plus économique tout en conservant un certain confort, j’aurais pris une couchette entre Milan et Lecce :
- Paris Zurich en Standard : 49 EUR
- Zurich Milan en Seconde : 44 EUR
- Milan Lecce en couchette partagée : 59 EUR
Dans tous les cas je vous déconseille de voyager en places assises entre Milan et Lecce car le tarif de 39 EUR ne vous ferait économiser que 20 EUR pour un inconfort bien plus important !
Bien évidemment si vous vous décidez au dernier moment et que vous choisissez les prix modifiables et annulables les prix explosent et le voyage pourrait vous coûter jusqu’à trois fois les prix indiqués !
Les tarifs indiqués sont ceux pratiqués en août 2024.
Buon viaggio !
Bon voyage !
Super intéressant comme voyage. Une belle alternative à Ryanair ou Transavia.
Merci pour ce partage avec nous.
Très intéressant et passionnant
Merci d’avoir partagé votre voyage avec nous, vos photos sont magnifiques et merci pour toutes vos explications et conseils
Super reportage sur ce voyage qui donne vraiment envie d’essayer par le train !! Je connais les Pouilles aussi et vos commentaires sont vrais …merci pour vos infos sur les tarifs et les liens …
Merci beaucoup pour tous les détails pratiques.