Explorer Le Caire en cinq jours en prenant son temps
Le Caire est aujourd’hui une mégalopole de 24 millions d’habitants. Nous l’avons exploré pendant cinq jours à la fin du ramadan. Une expérience très enrichissante !
Trois semaines du Caire à Siwa puis Alexandrie et le Sinaï
En avril 2024, nous sommes partis trois semaines en Égypte à la découverte du Caire, puis de l’oasis cachée de Siwa, de la fabuleuse Alexandrie et enfin du Sinaï. Nous avons construit ce voyage en indépendant, conçu pour sortir des sentiers battus dont je vous dévoile le récit à travers trois articles :
- Explorer Le Caire en cinq jours (cet article)
- En route vers l’oasis méconnue de Siwa, dans le désert libyque
- L’Égypte côté mer : Marsa Matrouh, Alexandrie et le Sinaï
J’ai également rédigé un autre article avec quelques clés pour voyager en indépendant en Égypte, afin que vous puissiez, vous aussi, profiter pleinement de ce pays extraordinaire.
Tous les textes en couleur corail indiquent un lien interne ou externe que je vous invite à cliquer.
Arrivée de nuit au Caire pendant le ramadan
Pour aller de Paris au Caire, nous n’avons pas d’autre choix que l’avion : il n’existe plus de liaisons maritimes pour rejoindre l’Égypte depuis les ports méditerranéens
Les horaires de notre vol sont peu commodes et nous arrivons au milieu de la nuit.
Effervescence noctambule dans le centre du Caire
Bien que l’aéroport soit distant d’une vingtaine de kilomètres du centre-ville, un réseau d’autoroutes urbaines sur pilotis nous permet d’y accéder très vite. Tant pis pour les riverains qui subissent un intense trafic automobile à la hauteur du troisième étage !
Il est deux heures du matin et notre taxi nous dépose dans la rue Talaat Harb, une des principales artères commerçantes du centre-ville, Wasat al-Balad.
À notre grande surprise nous avons l’impression d’être en milieu d’après-midi un jour de solde tellement nous voyons de monde dans la rue ! En fait notre chauffeur nous apprend que nous sommes à trois jours de la fin du ramadan et que la coutume dicte que chacun s’habille de vêtements neufs et offre des cadeaux pour la fête d’Aïd Al-Fitr, c’est donc la ruée vers les magasins !
Il faut nous frayer un chemin au milieu de commerçants qui veulent absolument nous vendre un costume pour rejoindre notre hôtel, le Holy Sheet, qui est caché au dixième et dernier étage d’un immeuble qui semble presque vide. C’est bien fatigué que nous nous écroulons sur notre lit bercé par la rumeur de la ville.
Cinq jours au Caire pour tenter de mieux comprendre la ville
Au réveil le lendemain de notre arrivée, la ville semble bien calme. Plus un bruit ! Nous avons même du mal à croire que nous sommes au centre d’une des plus grosses mégalopoles du Monde avec 24 millions d’habitants.
Nous prenons notre petit déjeuner sur la terrasse de l’hôtel, qui offre une vue spectaculaire sur la ville. À cette hauteur, il est surprenant de voir que de nombreuses constructions plus ou moins provisoires ont été érigées sur les toits, permettant aux habitants de s’aménager un peu d’espace supplémentaire.
Nous avons choisi de consacrer cinq jours à la visite du Caire, alors que la plupart des agences proposent une visite express de deux jours, voire seulement une journée.
Notre programme de visite nous fait découvrir plusieurs quartiers très diversifiés de la capitale :
- Wasat al-Balad : le centre-ville d’inspiration haussmannienne, qui a valu à la ville le surnom de « Paris sur le Nil ».
- Le Nil : l’artère vitale qui confère au Caire sa grandeur.
- Le Vieux-Caire : une enclave chrétienne où Jésus serait passé.
- Le Caire islamique : avec ses mosquées, ses souks et ses ruelles datant d’avant l’époque ottomane.
- Le Caire du temps des pharaons : avec le musée égyptien et les pyramides de Guizeh.
Wasat al-Balad : le Paris sur le Nil
Notre hôtel est dans le quartier de Wasat al-Balad qui est le cœur de la ville dessiné au XIXe siècle, Ismaïl Pacha, le khédive (vice-roi) d’Égypte et du Soudan qui avait entrepris de moderniser son pays. Inspiré par le Paris haussmannien, il désira faire du Caire une capitale avec de larges avenues bordées de magnifiques immeubles dans un style néo-classique français convergeant vers des places en étoile.
La haute bourgeoisie cairote y côtoyait les colons français et britanniques dans un environnement qui se voulait le plus européen possible et avec comme ambition d’être le Paris sur le Nil.
Un héritage architectural riche malgré le manque d’entretien
Depuis l’histoire est passée par là. Le pays, notamment du temps du président Nasser, s’est efforcé de rompre les liens avec les colonisateurs européens et à ancrer l’Égypte dans le monde arabe. Le Caire n’a plus cherché à se comparer à Paris, mais n’a pas non plus trouvé de nouveaux modèles d’urbanisation.
La conséquence est que se balader dans Wasat al-Balad c’est encore reconnaître l’ambition d’Ismaïl Pacha, mais à travers des façades vérolées par une multitude de blocs de climatiseur et un grand nombre d’immeubles mal entretenus. Les devantures des anciens élégants magasins sont aujourd’hui très aguicheuses avec des lumières de toutes les couleurs très crues. Le commerce est partout sur les trottoirs et parfois même dans les voitures.
Quelques immeubles de Wasat al-Balad méritent toujours d’être vus, à commencer par les cinémas Metro et Rivoli qui ont gardé leurs belles façades d’origine. L’immeuble Yacoubian situé au 34 de la rue Talaat Harb a acquis une renommée inattendue grâce à l’écrivain Alaa al-Aswany qui en a fait le cadre d’un roman sur une très vivante et intéressante peinture de la société cairote dans les années 90. Enfin, la présence de la synagogue Cha’ar Ha Chamaïm rappelle qu’autrefois Le Caire a abrité une communauté juive qui a aujourd’hui presque entièrement disparu.
Seule la place Talaat Harb a gardé la belle harmonie qu’avait rêvé Ismaïl Pacha pour son Caire à lui.
La place Al-Tahrir au cœur de la révolution de 2011
Un peu plus loin nous rejoignons la fameuse place Al-Tahrir qui est mondialement connue depuis les évènements de 2011. Signifiant « place de la libération » et elle a été au cœur du printemps arabe avec les manifestants qui l’ont occupée et ont provoqué la chute du Président Moubarak.
Depuis, la place a été réaménagée et elle est sévèrement gardée par l’armée pour éviter une nouvelle révolution sur un lieu hautement symbolique.
Le souk « 26 th of July Corridor » : ce n’est pas pour les touristes !
Voilà un lieu que les touristes ne connaissent pas ! Un endroit que nous découvrons presque par hasard, au fil de nos pérégrinations.
Il s’agit d’un gigantesque souk situé sous une autoroute urbaine baptisée « 26 th of July Corridor ». Il n’a pas le cadre typique des voûtes en pierre de Khan El-Khalili, mais il a l’avantage d’être authentique et fréquenté uniquement par les Cairotes.
Nous profitons de Wasat al-Balad la nuit pendant le ramadan et l’Aïd Al-Fitr.
Beaucoup de touristes occidentaux préfèrent éviter de visiter l’Égypte pendant le ramadan. Il est vrai que cette période présente quelques inconvénients : des horaires d’ouverture des musées et des lieux publics plus restreints, ainsi qu’une difficulté à trouver des restaurants ou des cafés ouverts pendant la journée. Cependant, être au Caire à ce moment, c’est partager chaque soir une ambiance de fête incroyable avec ses habitants.
Autant le quartier de Wasat al-Balad est calme en journée, autant il s’anime le soir. La foule devient dense, aussi bien sur les trottoirs que dans les magasins ou devant les nombreuses gargotes. Des queues de Cairotes affamés se forment face à d’énormes chiche-kebabs, juste avant la rupture du jeûne ! C’est le moment que nous préférons pour nous balader dans ce quartier après nos visites quotidiennes.
C’est à ce moment-là que nous réalisons la difficulté de traverser les rues ou les boulevards « à la cairote ». Quelle que soit la densité du trafic ou la vitesse des voitures, il faut prendre son courage à deux mains et avancer d’un pas tranquille, mais assuré, sans jamais reculer, même d’un centimètre, tout en essayant de capter le regard des chauffeurs droit dans les yeux. Les premières fois sont terrifiantes, mais on s’y habitue très vite.
Le Nil majestueux
Comme les Cairotes nous avons pris l’habitude chaque soir de nous rendre au bord du Nil qui plus qu’un fleuve est l’essence même de l’Égypte. Sans lui, le pays n’existerait tout simplement pas, car il ne serait qu’un désert sans eau. Le fleuve est d’ailleurs le fondement de la culture populaire, célébré au même degré qu’un symbole de prospérité et de la beauté de l’Égypte.
Grande fête populaire sur le pont Qasr el Nil
Au moment de l’Aïd al-Fitr, le pont Qasr el-Nil, qui relie la place Al-Tahrir à Gezira, est l’un des endroits les plus fascinants où se trouver. De nombreux jeunes cairotes y déambulent, par petits groupes plus ou moins enthousiastes, dans une ambiance festive, tout en observant l’intense trafic d’embarcations de toutes sortes sur le fleuve.
Nous assistons également au départ des croisières populaires, prises d’assaut par les Cairotes. Ces bateaux réunissent un mélange hétéroclite : des garçons aussi déchaînés que sur les dance floors londoniens ou parisiens, et des couples sages et réservés, profitant de l’effervescence d’une manière plus discrète.
Gezira : une ile branchée
Visiter Gezira, c’est pénétrer un autre univers, celui d’une Égypte tournée vers une société et un mode de vie mondialisé. Les femmes y portent moins le voile, les signes de richesse se font plus voyants, et les personnes LGBT osent se rencontrer.
Au sud de l’ile, nous observons le nouvel Opéra et de la Tour du Caire qui sont des monuments emblématiques du Caire actuel.
Après nos longues journées de marche et de visite, nous apprécions le calme et la volupté des jardins de l’hôtel Sofitel. Son emplacement, à la pointe sud de l’île de Gezira, est unique. Installés à une table juste au bord du fleuve, nous ne nous lassons pas de la vue et des nombreux bateaux qui voguent sur le Nil.
Au nord de l’ile s’étend Zamalek, le quartier résidentiel chic du Caire. Nous l’aurions visité si nous avions eu plus de jours, car d’autres quartiers nous ont semblé plus intéressants.
Le Caire : une ville à nouveau (un peu) moins homophobe ?
En 2001, la police avait effectué une rafle à bord d’un bateau-discothèque réputé comme un lieu de rencontres gays, en embarquant 52 hommes accusés de débauche. Le procès avait eu un retentissement international important et avait mis l’Égypte sur la sombre liste des pays réprimant sévèrement l’homosexualité.
Après notre première nuit à l’hôtel, nous décidons de nous héberger chez l’habitant, une option qui s’est bien développée ces dernières années et qui nous permet d’espérer un contact plus authentique avec les Cairotes.
Nous sommes chaleureusement accueillis par un jeune Égyptien ayant vécu en Australie. Au fil de la conversation, nous apprenons que le pays, après des années marquées par un islam rigoriste, connaît aujourd’hui une forme de libéralisation, certes timide, mais bien réelle. Cette dynamique vient en grande partie d’Arabie Saoudite, qui a initié ces dernières années une véritable révolution, comme en témoigne la réouverture des cinémas après 35 ans de fermeture ou l’autorisation pour les femmes de conduire. L’Égypte, désireuse de conserver un profil plus libéral que son voisin, a suivi cette tendance.
Notre hôte nous conseille d’aller un soir à l’hôtel Marriott, installé dans l’ancien palais Al-Gezira, construit en 1869 par le Khédive Ismaïl. Le lieu est devenu le rendez-vous de la jet-set de la ville. Le bâtiment a gardé sa splendeur, et les jardins autour de la piscine sont très plaisants. C’est l’un des rares endroits au Caire où les couples gays peuvent se montrer sans crainte.
Notre hôte, bien qu’hétéro, nous dit avoir de nombreux amis gays. En nous préservant de toute naïveté, nous espérons y voir un signe d’une évolution positive de l’Égypte vis-à-vis de cette communauté. D’ailleurs dans un quartier un peu excentré nous découvrons avec étonnement une affiche publicitaire très homoérotique !
La corniche « Mamsha Ahl Misr : une balade agréable au bord du Nil
« Mamsha Ahl Misr » est une corniche récemment et joliment aménagée, offrant de très belles vues sur le Nil et, en face, Zamalek, le quartier chic et résidentiel.
Nous flânons agréablement avec, d’un côté, de nombreux cafés et restaurants, et de l’autre, le fleuve majestueux. En levant les yeux, nous apercevons de monumentaux immeubles, dont l’hôtel Saint-Régis. Nous terminons au restaurant « Zaza Cuisine ».
Le Vieux-Caire, un bastion copte sur la défensive
L’Égypte et plus particulièrement Le Caire abrite une importante minorité chrétienne copte. Nous lui rendons visite dans l’un des quartiers les plus anciens de la ville.
Aller au Vieux-Caire en métro
Aller dans le quartier du Vieux-Caire est l’occasion pour nous de prendre le métro cairote. Il est assez récent, puisque la première ligne a été bâtie avec l’aide des Français en 1987. Ce fut une prouesse industrielle, compte tenu de la densité des constructions de la ville et des eaux du Nil qui s’infiltrent dans le terrain sablonneux.
Aujourd’hui, il existe trois lignes qui relient le centre aux lointaines banlieues. Nous l’avons trouvé plutôt efficace et bien entretenu. Deux voitures de chaque rame sont réservées aux femmes pour les protéger de gestes déplacés masculins.
Une communauté copte cible de nombreux attentats
Nous descendons à la station Mar Girgis. Le quartier copte est juste à côté. Nous le visitons un après-midi, mais même dans ce quartier chrétien, les heures d’ouverture réduites pendant le ramadan nous empêchent de visiter tout ce que nous aurions voulu voir. Le bon côté est que nous bénéficions d’une faible affluence touristique.
L’ambiance du Vieux-Caire ressemble à un ghetto. Le quartier est très surveillé par la police, car ces quinze dernières années, les Coptes ont été la cible de plusieurs attentats de la part des Frères musulmans. Ce n’est qu’à l’intérieur que les chrétiens ne peuvent se sentir vraiment libres.
Lors de mes premières visites en Égypte dans les années 80, la bourgeoisie copte était bien plus visible dans la société.
Sur les traces de la fuite en Égypte de Jésus
Dans ce quartier plusieurs églises, un monastère et une synagogue sont regroupés dans un labyrinthe de petites ruelles ceinturées par d’anciens murs romains.
La plus connue est l’église suspendue, nommée ainsi parce qu’elle fut construite sur les tours d’une forteresse et d’un ancien temple romain. C’est celle où nous passons le plus de temps à admirer les icônes.
L’église Saint-Serge doit sa renommée à Jésus lui-même ! D’après l’évangéliste Matthieu, le roi Hérode de Judée, prévenu par les mages de la naissance du roi des Juifs, aurait ordonné de tuer tous les enfants de moins de deux ans nés à Bethléem. Joseph l’aurait appris par un songe et aurait décidé de fuir vers l’Égypte. Dans leur périple, qui dura près de quatre ans, la Sainte Famille aurait séjourné dans une grotte à l’emplacement de l’église.
Le Vieux-Caire Islamique au charme authentique
Il faut bien consacrer deux journées à ce quartier tellement il est riche en mosquées, palais et souks. Il a été construit à partir du VIIe siècle lorsque les Arabes musulmans ont conquis l’Égypte mettant fin à la période byzantine. Nous avons trouvé qu’il avait beaucoup de charme.
Balade dans le quartier médiéval autour de Khan El-Khalili
Nous commençons bien sûr par Khan El-Khalili, célèbre pour son immense bazar, souvent parcouru au pas de charge par les groupes de touristes. Mais il ne faut pas s’y limiter, car de nombreuses ruelles alentour méritent d’être explorées. C’est ce que nous faisons.
Notre première visite est la mosquée Sayyidna el-Hussein. Bien qu’elle date du XXe siècle, elle vaut le détour, car elle est avant tout un lieu de vie, très fréquenté à toute heure de la journée. Les fidèles s’y rendent non seulement pour prier, mais aussi pour se reposer ou se rencontrer.
En sortant, nous nous retrouvons plongés dans une ambiance qui semble avoir peu changé depuis des siècles. On se sent transportés dans les contes des mille et une nuits !
Nous faisons une pause déjeuner sur la terrasse de l’hôtel Ryad, superbement rénové dans le style ottoman. Ce moment de calme est une parenthèse agréable dans l’agitation du quartier.
Un incontournable du quartier est Beit el-Suhaymi, un ensemble de trois demeures de notables datant du XVIIe siècle, magnifiquement restauré. Nous pénétrons dans une cour intérieure et visitons les différentes pièces, dont certaines étaient destinées à recevoir des invités de marque. À l’étage se trouve le domaine des femmes, qui observaient de façon discrète les allées et venues des hommes depuis leurs fenêtres en bois ajouré.
Nous atteignons les remparts qui ceinturaient l’ancienne ville médiévale du Caire. Il subsiste trois portes massives, dont celle de Bab al-Futuh très bien conservée.
Le cimetière de Bab al-Nasr : la ville des morts
De l’autre côté, nous visitons le cimetière de Bab al-Nasr, un site à l’atmosphère étrange où les tombes côtoient les habitations. Ici, des familles se sont installées dans des mausolées abandonnés : les vivants parmi les morts.
À l’origine, ce sont les gardiens du cimetière qui ont commencé à y résider, pour rester proches de leur lieu de travail. Cependant, au XXe siècle, l’exode rural et la grave crise du logement ont poussé de nombreuses personnes à chercher des espaces alternatifs pour vivre, et les cimetières sont devenus des refuges inattendus.
Nous restons discrets, soucieux de ne pas donner l’impression de pratiquer un voyeurisme déplacé, car les conditions de vie y sont extrêmement précaires, avec une absence quasi totale d’eau courante et d’électricité. Les Cairotes, eux-mêmes, ont un regard partagé sur ces « villes des morts » : certains y voient un symbole de résilience et de débrouillardise, tandis que d’autres y perçoivent une preuve criante de l’échec des politiques urbaines.
Aujourd’hui, l’avenir du cimetière reste incertain. Des rumeurs circulent sur un programme de rénovation urbaine, qui pourrait inclure la démolition partielle du site pour le transformer en parking. Ce type de projet illustre les tensions entre modernisation et préservation d’un espace chargé d’histoire et de mémoire.
Le complexe funéraire El-Ghuri
Un autre jour, nous partons à la découverte d’une différente partie du quartier islamique, en commençant par le complexe funéraire El-Ghuri. Cet ensemble architectural fut construit au début du XVIe siècle par le sultan Qansuh al-Ghuri, désireux d’affirmer sa puissance et de laisser un monument à sa mémoire après sa mort.
Le complexe se compose de deux parties principales : une mosquée et un mausolée, reliés par un toit qui enjambe une rue animée. L’architecture est typiquement mamelouke, avec ses somptueuses décorations de mosaïques, ses panneaux de marbre finement ciselés, et ses élégantes inscriptions calligraphiques qui ornent les murs.
Nous nous sentons privilégiés, car nous explorons le complexe en toute tranquillité, accompagnés seulement par le gardien des lieux. Il nous invite même à gravir un étroit escalier en colimaçon, qui mène jusqu’au sommet du minaret. De là, une vue imprenable s’offre à nous, dévoilant les toits du quartier islamique, ses minarets et ses ruelles sinueuses.
La rue El-Mouiz Li-din Allah : un musée à ciel ouvert
Nous empruntons ensuite la longue rue piétonne El-Mouiz Li-Din Allah, véritable musée à ciel ouvert. Ses mosquées majestueuses et ses vieilles demeures ornées de balcons en moucharabieh nous plongent dans un autre temps. L’atmosphère paisible contraste avec l’agitation incessante du reste du Caire, que nous avons laissée derrière nous.
En chemin, nous traversons le souk des Kheyyameyya, réputé pour ses tissus colorés et son artisanat traditionnel. Magnifiquement restauré, il offre une parenthèse hors du temps. Malheureusement, comme nous sommes en période de Ramadan et qu’il est encore tôt dans la journée, les échoppes sont fermées, privant le lieu de son effervescence habituelle.
Un peu plus loin, nous découvrons la superbe mosquée Aqsunqur, également appelée mosquée bleue en raison de son mur décoré de faïences bleues d’une grande finesse.
Nous apprécions particulièrement ce quartier, dont l’ambiance quasi rurale et les scènes de vie paisible semblent appartenir à un autre siècle.
Les mosquées emblématiques du Caire
Notre balade nous conduit à la mosquée la plus célèbre du Caire : celle du Sultan Hassan, considérée comme un chef-d’œuvre de l’architecture islamique. Majestueuse et imposante, elle incarne la grandeur du XIVe siècle, époque où elle fut construite.
Juste en face, nous visitons la mosquée Er-Rifai. Elle abrite notamment la tombe de Mohammad Reza Pahlavi, le dernier Shah d’Iran. Contraint à l’exil après la révolution iranienne menée par l’ayatollah Khomeini, le Shah erra dans plusieurs pays avant d’être accueilli par son ami, le président égyptien Anouar al-Sadate. Ce dernier lui offrit refuge et, après sa mort au Caire en 1980, il fut inhumé dans cette mosquée, qui servait déjà de mausolée pour les membres des familles royales égyptiennes.
Lors de notre visite, nous remarquons la présence de nombreux Iraniens venus rendre hommage à l’ancien souverain, témoignant de l’importance symbolique de ce lieu pour une partie de la diaspora iranienne.
Notre promenade se termine à la mosquée Ibn Touloun, l’une des plus anciennes et des plus vastes du Caire. Bien que nous ne puissions l’explorer qu’à l’extérieur en raison des horaires restreints du mois de Ramadan, nous pouvons observer son minaret original, doté d’un escalier en spirale, une rareté architecturale qui rappelle des constructions mésopotamiennes.
Le Caire et son héritage pharaonique
Même si notre voyage n’était pas tourné vers l’Égypte du temps des pharaons, nous ne résistons pas à l’envie de revisiter le musée Égyptien et les pyramides. Deux lieux tout à fait exceptionnels !
Le musée Égyptien : une émotion toujours intacte
Le Musée Égyptien, situé non loin de la place Al-Tahrir, dégage une atmosphère particulière grâce à son côté vétuste. Ce caractère désuet fait tout son charme : les objets sont exposés de manière foisonnante dans d’anciennes vitrines, pour la plupart inchangées depuis l’inauguration du musée en 1902. On a presque l’impression de se transformer en Indiana Jones, en explorant ce temple dédié à l’histoire antique.
La période de Ramadan joue en notre faveur, limitant l’affluence touristique habituelle. Une fois à l’intérieur, nous décidons de plus d’adopter une approche stratégique : au lieu de suivre l’ordre logique et chronologique des salles, nous nous orientons vers celles qui semblent les moins fréquentées. Cette méthode nous permet de profiter pleinement de la visite, sans nous sentir submergés par les groupes touristiques.
L’histoire de l’époque pharaonique, qui s’étend sur près de 3 000 ans, est d’une richesse impressionnante, mais aussi complexe. N’étant pas experts, nous choisissons de parcourir le musée en nous concentrant sur la beauté des pièces plutôt que sur leur contexte historique. Nous nous disons qu’il sera toujours possible de lire et approfondir nos connaissances plus tard.
Bien sûr, nous ne manquons pas de passer un long moment dans la salle consacrée au trésor de Toutankhamon. Ce trésor est tout simplement extraordinaire. Ce qui nous frappe, c’est que ce pharaon, pourtant considéré comme mineur, était entouré de tant de richesses. Cela nous laisse songeurs sur les trésors des pharaons plus importants, aujourd’hui disparus ou pillés.
Les pyramides de Gizeh
La seconde visite que nous faisons est celle des pyramides de Gizeh. Elles sont bien sûr ultra-touristiques, mais ce sont des monuments qui nous impressionnent toujours par leurs dimensions surhumaines et la beauté de leur géométrie.
Nous nous y rendons en taxi. L’entrée principale se situe juste à côté du Mena House, l’un des hôtels les plus prestigieux du pays. Il a accueilli nombre de chefs d’État et de célébrités, et la vue sur les pyramides est unique.
Le site des pyramides est immense. La plupart des touristes restent autour de la pyramide de Khéops, la plus grande et la plus proche de l’entrée. Nous décidons de nous en éloigner en entreprenant une petite randonnée qui nous fait passer à côté de la pyramide de Khéphren, puis de Mykérinos, jusqu’à une colline où nous avons une vue panoramique sur le site. Après avoir chassé, non sans difficulté, quelques chameliers un peu trop insistants pour nous y emmener sur le dos de leurs bêtes, nous apprécions la majesté du site où nous nous retrouvons presque seuls.
Les pyramides, bien que mondialement connues, gardent intact leur mystère, conférant même au mysticisme. Dans ces conditions, notre balade se veut méditative, et nous prenons notre temps pour la goûter.
Nous terminons notre visite dans un petit restaurant situé en dehors du site qui offre de sa terrasse une magnifique vue sur les pyramides.
Le Caire : une mégalopole fascinante, mais éprouvante
En cinq jours au Caire, nous n’avons pas vu le temps passer et n’avons fait qu’effleurer cette gigantesque métropole. Nous n’avons pas pu tout visiter, loin de là ! Par exemple, nous aurions été très intéressés de voir comment se construit le « nouveau Caire », le grand projet du gouvernement pour désengorger la capitale.
Pourtant, c’est avec un certain soulagement que nous la quittons pour poursuivre notre voyage. Le Caire, bien que fascinant, est aussi une ville épuisante : le bruit incessant, la densité de la circulation, la foule omniprésente et un air très pollué rendent le séjour assez éprouvant. Marcher dans ses rues demande une vigilance constante, entre les voitures qui slaloment et les trottoirs bondés. Hormis sur l’île de Gezira, les espaces calmes pour se poser sont rares.
Avoir parcouru la ville à la fin du ramadan et durant la fête de l’Aïd Al-Fitr a été une chance. Ces moments nous ont permis d’observer une période de l’année unique, riche en traditions et en festivités.
Le Caire nous a réservé des surprises tous les jours ! Dans quelle autre capitale pouvons nous croiser un troupeau de moutons en plein centre ville ?
Le Caire est sans doute une ville qui ne se laisse pas apprivoiser en une seule visite. Elle semble nécessiter plusieurs séjours pour en découvrir toutes les facettes et en apprécier les nuances. C’est pourquoi, malgré la fatigue qu’elle peut engendrer, nous gardons l’envie d’y retourner un jour ou l’autre.
Merci pour la balade dans cette ville du Caire que j’apprécie tellement. Tu m’as rappelé de très bons souvenirs 🙂
Merci Laurent pour ton retour !
Belle description du Caire. À bientôt en Egypte !
Merci Pascale !
Quelle belle visite , on découvre énormément de lieux très intéressants .
Dommage, n’ayant que l’adsl ? J’ai difficilement pu apprécier les vidéos .