De New York à Washington DC avec l’Acela, le TGV américain

A quoi ressemble, l’Acela, le TGV à l’américaine ? Je l’ai testé de New-York à Washington DC pour en comprendre ses spécificités.

Le Northeast corridor est la ligne ferroviaire la plus rentable des Etats-Unis

Les États-Unis sont connus pour être le pays de l’aviation et de la voiture. Le train est un mode de transport marginal.

Il existe pourtant une exception sur l’axe Boston – New York – Philadelphie – Baltimore – Washington DC que l’on appelle le « Northeast corridor ». C’est la seule ligne aux États-Unis où la part de marché du ferroviaire est supérieure à celle de l’aérien. J’étais curieux de voir comment les Américains avaient conçu ce service ferroviaire dans un pays qui a perdu la culture du rail depuis le milieu du XXe siècle.

Amtrak est la compagnie ferroviaire qui exploite le Northeast corridor. C’est une société publique fédérale née en 1971 de la fusion d’une vingtaine de compagnies ferroviaires.

Trajet Acela Boston Washington

Tous les textes en couleur corail indiquent un lien interne ou externe.

Acela : le fer de lance d’Amtrak sur le Northeast corridor

Acela, contraction des mots Excellence et Accélération, est le drôle de nom utilisé par Amtrak pour son service à grande vitesse entre Boston et Washington DC. On se demande pourquoi la compagnie n’a pas gardé l’ancienne appellation Metroliner qui était très explicite ? Notre SNCF a fait de même en accolant à TGV la discutable mention InOUi qui ne veut rien dire !

L’Acela est le TGV des Américains. La ligne, de 735 km, va de Boston à Washington DC en passant par New York, Philadelphie et Baltimore. Les trains, fabriqués par Alsthom et Bombardier, sont supposés allé jusqu’à 265 km/h, mais les contraintes de la voie de chemin de fer sont telles que la vitesse moyenne n’est que de 113 km/h !

Pour aller de New York à Washington DC, l’Acela met entre 2 h 45 et 3 h pour un trajet de 328 km. À titre de comparaison, le TGV va de Paris à Lyon en 2 h pour une distance de 391 km.

J’ai testé l’Acela de New-York à Washington DC avec un arrêt à Philadelphie.

Acela à New-York

A New York : ne pas se tromper de gare !

Attention ! New-York a deux grandes gares et pour aller à Washington DC, Philadelphie ou Boston il ne faut pas aller à celle que tout le monde connait : Grand Central Terminal

Grand Central Terminal : la gare mythique

Avant de débuter mon voyage sur l’Acela, depuis New-York, je me suis rendu à la gare et quand on pense à une gare à New York inévitablement, les images de Grand Central Terminal viennent à l’esprit.

Le hall central avec son plafond étoilé est magnifique et le passage obligé du parfait touriste new-yorkais ! Les cinéastes ont souvent mis en scène la gare, ce qui lui vaut aussi sa renommée. Malgré son prestige, elle n’est qu’une gare qui dessert la  banlieue de New-York : pas très prestigieux !

Grand Central New York

Penn station : la gare nostalgique de son passé

Pour les voyages longues distances, il faut se rendre à Penn Station. Jusqu’au début des années 60, la bâtisse, gigantesque et inspirée des thermes de Caracalla, faisait forte impression.

Ancienne Penn station

Malheureusement elle fut sauvagement détruite pour être remplacée par une gare souterraine surmontée du Madison Square à l’architecture très laide. Le seul aspect positif de l’histoire est que l’émoi chez les New-Yorkais fut tel que Grand Central Terminal devint un bâtiment protégé.

En 2022, la situation s’est cependant améliorée grâce à la Poste ! En effet, juste derrière Penn station se trouve le James A. Farley Building qui est l’ancienne poste centrale de New York. Le bâtiment, à la fière allure avec ses colonnes corinthiennes, a été construit en même temps que la gare originelle avec l’architecture imposante de style beaux-arts.

Ancienne poste à New-York

Une partie a été récemment réaménagée pour accueillir les trains longue distance. C’est le hall Moynihan, lumineux et moderne, utilisé par Amtrak la compagnie ferroviaire longue distance des États-Unis. Le résultat est plutôt réussi et le départ de New York a retrouvé un peu de glamour.

Moynihan hall

Autant le hall d’accueil est vaste, autant les quais sont sombres et étroits. C’est, peut-être pour cette raison que l’accès au quai n’est autorisé que quelques minutes avant le départ du train ?

Quai Penn station

Mon expérience de voyage avec l’Acela en Business class

J’ai voyagé sur l’Acela en deux temps : New York à Philadelphie puis le lendemain de Philadelphie à Washington DC. J’ai choisi la Business class, car j’ai trouvé que la First était beaucoup trop onéreuse.

Je n’ai pu éviter de faire un parallèle avec le TGV Paris — Lyon, car on retrouve la même clientèle avec une forte proportion d’hommes et de quelques femmes d’affaires plongés sur leurs ordinateurs portables indifférents à leur environnement.

Un sentiment d’exclusivité

Avec seulement 44 sièges en First et 260 en Business dans six voitures, l’Acela donne un sentiment d’exclusivité. À titre de comparaison, un TGV duplex composé de deux tronçons de huit voitures, propose 1032 places !

Acela plan intérieur

Acela : un train confortable

Le voyage à bord de l’Acela est plutôt plaisant. L’entrée du train et large et au même niveau que le quai. Des marqueurs sont indiqués sur le quai pour bien se positionner par rapport à sa voiture.

La très grande majorité des sièges sont orientés dans le sens de la marche car ils peuvent être retournés par le personnel Amtrak avant le départ. En Business class, les fauteuils sont groupés deux par deux de chaque côté de l’allée comme en Seconde classe sur les TGV.

L’harmonie cabine, dans les gris bleus, est assez austère. Le design rétro des sièges et les rideaux plissés en tissus donnent un air un peu vintage à la voiture.

Acela Business Class

Le pitch, soit la distance entre deux sièges l’un derrière l’autre, est par contre nettement supérieur sur l’Acela avec 106 cm au lieu de 86 cm sur les TGV. À titre de comparaison dans les avions, en classe économique, le pitch est le plus souvent limité à 78 cm !

Le fauteuil, très épais, est moelleux et confortable. Il s’incline généreusement sans gêner le voisin de derrière.

Fauteuil Business Acela

Les racks à bagages, fermés comme dans les avions, sont très spacieux et permettent d’y placer des valises ou sacs de relatifs grands formats.

Deux prises électriques sont positionnées le long de la paroi. À moins d’avoir un cordon très long, le passager assis près du couloir ne peut donc en bénéficier. Le Wifi est accessible en gare comme dans l’Acela et il est de bonne qualité. La SNCF devrait s’en inspirer.

Une caractéristique de l’Acela que j’ai aimée est la « Quiet car ». Dans cette voiture, il est interdit d’avoir des conversations téléphoniques ou avec ses voisins. Lorsque l’on voyage, seul, c’est bien agréable.

Une autre fonctionnalité que j’ai appréciée est de pouvoir changer son siège sur l’application Amtrak y compris pendant le voyage. Si le train n’est pas plein, cela permet de choisir une place qui convienne davantage, comme pouvoir être assis isolé sur une rangée de deux sièges.

Les toilettes sont plus spacieuses et mieux entretenues que sur les TGV.

Au milieu du train se situe la voiture-bar qui ressemble étrangement à celle des TGV avec un kiosque et des tables hautes. De manière surprenante, les tarifs sont assez bon marché par rapport à ce que l’on trouve en ville à New York ou Washington DC. En France, c’est plutôt l’inverse.

Acela voiture bar

La First classd’Acela

Je n’ai pu expérimenter moi-même la First class d’Acela, mais d’après mes recherches internet les trois principales différences sont :

  • Un accès au salon dans les gares
  • Des sièges plus larges à bord avec seulement trois de front au lieu de quatre
  • Un repas chaud servi à bord avec toutes les boissons gratuites.

Pendant mon voyage, j’étais passé observer à quoi ressemblait la First class. Comme l’équipage était en plein milieu du service du déjeuner, je n’avais pu rentrer dans la voiture. Aussi, qu’elle ne fut ma surprise de voir un steward m’amener à ma place en Business class un entremet et une bouteille d’eau ! Il me dit qu’il avait perçu ma curiosité et avait voulu me donner un avant-gout de la First class pour m’inciter à la prendre une autre fois. Chapeau !

La différence de prix est cependant très importante avec la Business class et elle ne me semble pas en valoir le coup. Le test en Première classe réalisé par Matthew Klint, de New York à Washington DC, vous confèrera une bonne idée de la prestation.

Mon trajet de New York à Washington

À bord, j’étais bien l’un des seuls à regarder les paysages !

Après un long tunnel sous la Hudson river, l’Acela sort dans le paysage industriel du New Jersey. Ce qui frappe est l’état des infrastructures ferroviaires par rapport à l’Europe. Les ponts comme les caténaires sont complètement rouillés et on se demande comment tout cela tient encore debout !

Pont Rivière Passaic

Catenaire rouillé

Est-ce dû à la technologie pendulaire de l’Acela ou à l’état parfois antédiluvien des voies ? Mais on se sent souvent beaucoup secoué sur le trajet entre New York et Washington DC, en tout cas bien plus que dans un TGV autrement plus stable et silencieux à une vitesse bien supérieure.

la magnifique gare monumentale de Philadelphie

J’ai fait mon trajet en deux temps pour m’arrêter à Philadelphie ce qui m’a donné l’occasion d’admirer la magnifique gare de 30th street qui à elle seule mérite de visiter la ville.

30th street Philadelphia station a été inaugurée en 1933. Son style art déco et son hall immense sont une réussite architecturale.

Gare Philadelphie

Hall gare Philadelphie

Au fond de la gare je remarque un mémorial impressionant qui rend hommage aux 1307 employés de la Pennsylvania Railroad Company qui ont perdu la vie au cours de la 2nde guerre mondiale. Ce chiffre élevé, rien qu’au niveau d’une seule entreprise, montre l’effort des Américains pendant cette guerre.

Memorial WW2 Philadelphia station

Après Philadelphie, l’Acela continue son chemin vers Wilmington, la plus grande ville du minuscule état du Delaware, fief du Président Joe Biden, puis vers Baltimore. Les paysages deviennent plus verdoyants et l’on passe régulièrement sur des ponts qui franchissent des rivières comme la Schuylkill.

Rivière Schuylkill

Delaware

L’Acela continue le long de la large embouchure de la Susquehanna avec l’Atlantique à l’horizon. Nous passons à côté de coquettes cités balnéaires.

⁨Chesapeake Bay⁩

⁨Susquehanna River⁩

Je n’ai pu visiter la ville de Baltimore réputée pour être l’une des plus pauvres des États-Unis. Ce n’est pas l’état délabré des quais de la gare qui auront pu me faire changer cette image.

Gare de Baltimore

La gare de Unionà Washington DC

Le voyage se termine à l’Union Station de Washington DC qui est un autre exemple de gare à l’architecture monumentale.

Hall Union station Washington

Union est un nom très courant pour les gares américaines. La raison est qu’autrefois les États-Unis avaient de nombreuses compagnies ferroviaires qui se partageaient des gares, d’où le concept d’union.

La gare est centrale et bien reliée au métro de la capitale fédérale.

L’offre d’Amtrak sur le Northeast corridor

L’Acela n’est pas le seul train proposé par Amtrak sur le corridor Northeast.

Le moins que l’on puisse dire est que l’offre proposée n’est pas évidente à appréhender pour un nouveau client.

Une offre complexe avec trois types de trains

Lorsque l’on va sur le site Amtrak.com on découvre trois types de trains sur le couloir du Nord-Est :

  • L’Acela avec la classe Business que j’ai expérimentée et la First qui est le service Premium d’Amtrak.
  • Le Northeast Regional avec la classe Coach et la Business. Ces trains sont plus lents (environ 30 minutes de plus) et s’arrêtent à plus de gares.
  • Les trains longues distances avec la classe Coach et wagons-lits. Ils sont proposés à la vente, mais à des prix volontairement prohibitifs pour donner la priorité aux voyageurs allant plus loin que Washington DC vers, par exemple, Miami ou La Nouvelle-Orléans.

Des prix bien plus élevés qu’en France

La First sur l’Acela de New York à Washington revient entre 243 et 475 dollars. Inutile de dire que j’ai trouvé le tarif prohibitif pour un trajet aussi court.

Les prix en Business sur l’Acela vont de 71 à 278 dollars. Il est donc important d’anticiper, car voyager au dernier moment peut coûter cher !

Le voyage à bord du Northeast Regional est en général moins cher surtout en coach, car les tarifs débutent à 31 dollars, mais ils peuvent vite augmenter si la demande est forte et atteindre les niveaux de l’Acela.

D’une manière générale, les tarifs les plus élevés sont les seuls à être flexibles.

Sur une distance similaire, les prix du TGV Paris Lyon semblent doux en comparaison puisqu’un aller en Business Première, le tarif le plus cher, n’est que de 142 euros soit, en novembre 2022, le même montant en dollar.

 

Une belle expérience, mais loin des performances européennes

J’ai bien aimé mon expérience de voyage sur l’Acela, mais Amtrak est encore loin de ce que l’Europe peut proposer de mieux avec Thalys ou l’Eurostar qui sont plus modernes et performants.

Une performance opérationnelle médiocre

J’ai recherché la performance en termes de ponctualité de l’Acela, mais je n’ai réussi à trouver que celle de l’ensemble des services passagers d’Amtrak sur le corridor du nord-est et celle-ci est médiocre avec entre 15 et 25 % des trains qui sont en retard (plus de 10 minutes) selon les années. Elle n’est cependant pas plus mauvaise que celle de l’aérien sur le même axe.

À titre de comparaison, entre Paris et Lyon, les retards ne concernent qu’environ 5 % des TGV. Il est vrai que c’est l’une des meilleures performances de la SNCF que l’on ne retrouve pas sur l’ensemble de son réseau.

Un trafic en hausse constante

Avec 3,5 millions de passagers transportés en 2019 sur le corridor du Nord-Est, l’Acela est un succès. Il est d’autant plus marquant qu’il est unique sur le réseau américain. On est loin cependant de la fréquentation des trains en Europe. Ainsi, en 2017, 44 millions de passagers ont emprunté la ligne TGV Paris Lyon !

Une nouvelle génération de train en 2024

Une nouvelle génération de trains est prévue d’être mise en service en 2024 avec des temps de transport réduits, mais qui seront toujours bien supérieur à ce que nous avons en Europe.

La promesse est un train plus confortable et une forte augmentation de la capacité pour prendre encore plus de parts de marché.

Futur train Acela

Future Business class Acela

Amtrak est d’abord le spécialiste des trains transcontinentaux

Le vrai savoir-faire d’Amtrak, qui est unique, ce sont les trains très longue distance que nous n’avons pas en Europe et qui sont de véritables croisières ferroviaires.

C’est ce que vous pouvez découvrir dans mes deux autres articles :

 

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