L’Égypte côté mer : Marsa Matrouh, Alexandrie, et le Sinaï
L’Égypte est un pays tourné vers la mer Méditerranée et la mer Rouge. Au cours de notre voyage, nous avons cherché à en percevoir leurs différences tant culturelles que géographiques.
Trois semaines du Caire à Siwa puis Alexandrie et le Sinaï
En avril 2024, nous sommes partis trois semaines en Égypte à la découverte du Caire, puis de l’oasis cachée de Siwa, de la fabuleuse Alexandrie et enfin du Sinaï. Nous avons construit ce voyage en indépendant, conçu pour sortir des sentiers battus dont je vous dévoile le récit à travers trois articles :
- Explorer Le Caire en cinq jours en prenant le temps !
- En route vers l’oasis méconnue de Siwa, dans le désert libyque
- L’Égypte côté mer : Marsa Matrouh, Alexandrie et le Sinaï (cet article)
J’ai également rédigé un autre article avec quelques clés pour voyager en indépendant en Égypte, afin que vous puissiez, vous aussi, profiter pleinement de ce pays extraordinaire.
Dans cet article, le dernier de notre voyage égyptien, nous commençons par la découverte de la côte méditérranéenne, puis d’Alexandrie. Ensuite nous prenons un avion pour aller dans le Sinai où nous séjournons pour une semaine à Dahab. Ensuite nous continuons vers Sainte-Catherine avant de conclure notre voyage à Ismaïlia au bord du canal de Suez.
Tous les textes en couleur corail indiquent un lien interne ou externe que je vous invite à cliquer.
À la découverte de la côte méditerranéenne égyptienne
Après avoir quitté l’oasis de Siwa, nous décidons de faire un arrêt à mi-parcours à Marsa Matrouh. Ne cherchez pas cette ville dans les catalogues des voyagistes européens, car bien que la ville soit une importante destination touristique, elle n’est connue que des Égyptiens. Elle se situe le long de la côte méditerranéenne à 300 km à l’ouest d’Alexandrie.
Marsa Matrouh : la cité balnéaire des Cairotes
Marsa Matrouh est l’une des plus grandes stations balnéaires d’Égypte, mais ce sont surtout les Cairotes qui s’y rendent en été pour échapper à la chaleur étouffante du Caire.
La ville s’étend autour d’une jolie baie, mais l’architecture est très brouillonne et sans aucune harmonie. L’ambiance est cependant plaisante, et on la visite surtout pour observer les Égyptiens en vacances.
De belles plages de sable blanc fin s’alignent le long de la mer, avec une eau turquoise qui fait davantage penser aux tropiques qu’à la Méditerranée. Nous sommes en avril, au tout début de la saison estivale, et il n’y a pas foule sur le sable. Les femmes, même jeunes, sont bien couvertes, alors que les hommes sont affranchis des strictes règles religieuses.
Comme dans tout le Moyen-Orient, c’est le soir que la ville s’anime autour de la corniche et des rues commerçantes. Mais on se croirait en Italie, avec « la passeggiata », où tout le monde se promène pour voir, être vu, se détendre et discuter.
Nous dînons dans un excellent restaurant de poissons populaire. Le menu n’est qu’en égyptien, mais un serveur prend le temps de nous l’expliquer.
Marsa Matrouh pourrait être une ville charmante si elle n’était pas aussi sale. À certains endroits de la corniche, nous déambulons sur un véritable lit de détritus en plastique !
D’une manière plus générale, nous avons été assez choqués de constater la présence de détritus et de plastiques un peu partout en Égypte, y compris dans les sites naturels parmi les plus beaux du pays, comme par exemple sur le chemin du Mont Sinaï. Une éducation reste à mettre en place pour sensibiliser tant les Égyptiens que les touristes à l’importance de préserver l’environnement, afin que l’image de saleté souvent associée au pays s’efface progressivement.
De Marsa Matrouh à Alexandrie en voiture : des surprises urbanistiques !
Le lendemain, un chauffeur nous attend pour nous emmener à Alexandrie. Dès la sortie de la ville, nous nous engageons sur une autoroute à deux fois six voies, et de chaque côté, nous longeons en plus une route nationale ! Elle est absolument déserte.
Un peu après notre départ, nous côtoyons une centrale nucléaire en construction : El-Dabaa. C’est un vieux projet qui a débuté dans les années 80, puis abandonné et relancé grâce à une coopération avec les Russes. Elle devrait être opérationnelle en 2030 et couvrir 10 % des besoins en électricité de l’Égypte.
À mi-chemin, nous passons à côté de New Alamein City, qui est carrément une ville nouvelle.
Puis, le long de la mer, c’est une enfilade de resorts plus ou moins en construction. Nous avons presque l’impression d’être à Dubaï !
Je ne me doutais pas de voir autant de projets pharaoniques sur une côte aussi peu connue. Un vieux guide du Routard des années 80 m’indiquait que la côte était déserte, bordée de magnifiques plages de sable blanc et d’une mer turquoise. Cela a bien changé, et je me pose plein de questions, dont j’aurai des réponses partielles par la suite en faisant des recherches sur Internet. Il apparaît que les fonds, gigantesques, proviennent surtout des Saoudiens et des Émiratis.
Les objectifs sont peu clairs.
- Développer une nouvelle région touristique ? Cela me semble bien surdimensionné, car son attrait est limité aux riches Cairotes ou Moyen-Orientaux et seulement pendant les mois d’été.
- Créer une ville nouvelle pour désaturer Le Caire et le Delta ? Un peu trop loin des centres économiques du pays.
- Quant à la « North Coast Road », digne d’une autoroute californienne, mais sans le trafic, serait-elle là pour encourager le commerce avec la Libye ? Peu probable ! Ou bien aurait-elle aussi un objectif militaire caché ?
Tout ceci me paraît bien fumeux, alors que ma visite du Caire m’a démontré une urgence absolue d’investissements pour juste maintenir la mégalopole à flot.
Après trois heures de route, nous arrivons à Alexandrie.
Alexandrie : une ville méditerranéenne ou arabe ?
Nous devions rester trois jours à Alexandrie, mais en arrivant nous apprenons que la compagnie Air Cairo, que nous avions réservée pour la suite de notre voyage, a supprimé l’un des trois vols hebdomadaires. Notre séjour est donc écourté, et nous n’avons plus qu’un jour et deux soirées pour découvrir cette ville. Nous nous adaptons !
Ne pas venir avec ses préjugés, car le fameux phare n’existe plus !
Alexandrie fait partie des villes qui véhiculent un imaginaire très fort. Son phare faisait partie des sept merveilles du monde antique, et sa bibliothèque est universellement connue. Je savais que ces monuments iconiques avaient disparu, mais les photos de la baie en arc de cercle que j’avais vues avant de partir sont spectaculaires. Inconsciemment, je l’associais un peu à ce patrimoine perdu qu’Asterix eu la chance de voir en allant rendre visite à Cléopatre !
L’Alexandrie contemporaine n’a plus le prestige de son glorieux passé, quand elle était le centre culturel, artistique et scientifique du monde antique. Même encore au début du XXe siècle, la ville comptait parmi les plus attractives du bassin méditerranéen, aux côtés de Beyrouth, avec de nombreux palaces qui attiraient l’élite mondiale.
Il faut donc se détacher de cette image pour l’apprécier avec son visage actuel, à la fois un peu méditerranéen et de plus en plus égyptien, car la ville est dynamique et attachante.
Le Windsor Palace Hotel avec son charme d’antan
Nous descendons au Windsor Palace Hotel. Aujourd’hui, ce n’est plus le plus luxueux palace de la ville, mais dès que nous entrons dans le hall, nous ressentons son atmosphère historique. Il n’est pas difficile de nous imaginer tout juste débarqués de notre paquebot en provenance de Marseille ! Nous rejoignons notre chambre par un superbe ascenseur, encore d’origine.
Nous sommes étonnés par la grande hauteur sous plafond de notre chambre. À l’époque où la climatisation n’existait pas, cela permettait à l’air chaud de s’échapper, maintenant ainsi une relative fraîcheur au niveau du plancher.
Nous montons ensuite au restaurant panoramique pour prendre un verre sur sa terrasse, qui domine la fameuse baie d’Alexandrie. Elle est en arc de cercle et a gardé la forme du port antique.
C’est déjà la fin de la journée, et comme les Alexandrins, nous descendons nous balader sur la corniche pour admirer le coucher de soleil.
De nuit Alexandrie est encore plus séduisante
Une fois la nuit tombée, nous nous rendons sur Ahmed Oraby Square et la place Al-Tahrir. Les deux places rectangulaires sont contiguës et forment un T, avec, en leur centre, de belles allées bordées de palmiers. Autour, quelques immeubles de l’époque coloniale donnent une certaine majesté à l’ensemble. L’éclairage nocturne magnifie l’architecture qui a connu de meilleurs jours. L’animation sur les trottoirs est tout simplement incroyable, avec une multitude d’étals, de boutiques et de cafés.
En rentrant au Windsor Palace, sur Ahmed Oraby Square, face à la mer, nous passons devant l’imposant mémorial de la guerre qui rend hommage à tous les soldats égyptiens morts pour la patrie. Juste à côté se tient le consulat de France, qui semble bien disproportionné par rapport à sa fonction actuelle. Il rappelle un temps où l’influence française était forte en Égypte.
Plus tard dans la soirée, nous décidons de dîner au « White and Blue », l’excellent restaurant grec du club nautique. Face à la plage et aux embarcations, nous avons l’impression d’être sur une petite île des Cyclades ! Il se situe au bout de la baie à la place de l’ancien phare.
Se balader sur la corniche de la baie d’Alexandrie
Alexandrie est la seconde métropole d’Égypte, mais son centre historique se découvre facilement à pied, sans avoir besoin d’itinéraire précis.
Depuis l’hôtel, nous partons le long de la corniche vers l’ouest. Il faut faire abstraction de l’incessant trafic routier pour apprécier la balade. Certains immeubles dans un style Art déco ont encore fière allure.
Nous remarquons la mosquée Abou el Abbas el Morsi, avec son minaret de 73 m de haut. C’est un haut lieu du soufisme.
Nous passons à côté d’une plage privée, mais la saleté de la plage et de l’eau ne donne pas vraiment envie de s’y arrêter. Ensuite, nous découvrons un port de pêche qui ne manque pas de charme, avec ses jolies barques en bois.
Nous arrivons au marché aux poissons avant de nous rendre au fort Qaitbay, qui fut construit avec les pierres du fameux phare d’Alexandrie.
Au cœur du quartier Anfoushi et de son marché
Après avoir vu la plage de Ras at Tin, surtout intéressante pour sa construction navale, nous pénétrons dans le cœur du quartier Anfoushi par des rues étroites surmontées de très hauts immeubles, souvent bien délabrés. C’est l’ancien quartier ottoman. L’ambiance y est plutôt villageoise et tranquille, contrastant avec l’architecture oppressante.
Nous atteignons le marché immense et animé qui s’étend dans de nombreuses rues jusqu’à la place Al-Tharir.
Nous déjeunons à la Taverna, un excellent petit restaurant populaire, près de la gare de tramway de Ramleh. Nous passons ensuite un moment à observer le fascinant ballet de tramways brinquebalants, dont certains ont même deux étages !
La nouvelle bibliothèque d’Alexandrie
Nous nous rendons à la Grande Bibliothèque d’Alexandrie. Dans le monde antique, l’ancienne bibliothèque, dont la collection a compté jusqu’à 900 000 parchemins, était la plus vaste et la plus prestigieuse du monde. Elle a malheureusement brûlé en 48 avant Jésus-Christ. L’architecture du nouveau bâtiment, qui a été inauguré en 2002, est très réussie. À l’extérieur, il reprend la forme d’un disque solaire qui s’élève de la mer vers le ciel, symbolisant l’enracinement de la bibliothèque dans le passé et son ouverture vers l’avenir.
À cause de l’annulation du vol d’Air Cairo, qui nous a retiré un jour de notre séjour à Alexandrie, nous ne pouvons visiter l’intérieur. En effet, nous sommes samedi et la bibliothèque ferme à 14 h.
Le musée gréco-romain : une pépite
Nous décidons donc de nous rendre au musée gréco-romain, qui a été complètement restauré et est un petit bijou inattendu. Les collections sont superbement présentées. Nous avons un coup de coeur pour les statuettes Tanagra nommées d’après la ville grecque où elles ont été découvertes. Ce sont des figurines miniatures funéraires en terre cuite datant du IVe au IIIe siècle av. J.-C impressionantes par leur réalisme.
Une carte montre à quoi ressemblait l’ancienne Alexandrie, qui était située sur une bande de terre entre la mer et une lagune.
Alexandrie : un goût de trop peu
Nous terminons notre balade par un verre sur la terrasse du Métropole, un autre ancien palace d’Alexandrie.
En un jour et deux soirs, nous n’avons pu que survoler Alexandrie, mais elle nous a donné envie d’y retourner pour mieux la découvrir. Ses racines sont très méditerranéennes, mais la ville actuelle semble l’avoir oublié et est devenue plus tournée vers le monde arabe.
Envol vers le Sinaï
Pour terminer notre tour d’Égypte, nous décidons de nous rendre dans le Sinaï : découvrir les fonds sous-marins de la mer Rouge, mondialement réputés, mais également le mont Sinaï et le monastère Sainte-Catherine.
Nous privilégions généralement le transport terrestre, qui permet de voir davantage de paysages, mais le voyage de 12 heures en bus de nuit nous a un peu découragés. Aussi, nous choisissons d’y aller en avion.
Vue panoramique sur le Delta du Nil avec Air Cairo…
Nous arrivons à l’aéroport de Borg El Arab, situé à 40 km à l’ouest d’Alexandrie. Cet aéroport, principalement dédié aux destinations égyptiennes et au Moyen-Orient, témoigne du fait que l’attrait de la ville et de la côte méditerranéenne reste encore largement inconnu des touristes européens.
Au moins à bord d’un ATR 72, un avion à hélices comme autrefois, le charme de notre voyage n’est pas totalement rompu malgré les inévitables filtres de sécurité aéroportuaires.
Le décollage nous offre une vue magnifique d’Alexandrie à notre gauche. En observant la ville qui s’étend à perte de vue, au-delà de son centre historique, on prend toute la mesure de la pression démographique. C’est fascinant de repenser qu’en 1981, lors de mon premier voyage en Égypte, Alexandrie comptait à peine 2,5 millions d’habitants, contre 5,5 millions aujourd’hui. La comparaison avec la carte d’Alexandrie du temps de l’antiquité que nous avons vu la veille est encore plus incroyable.
Nous survolons ensuite le delta du Nil, où ses nombreuses branches se distinguent avec netteté. Mais la réalité est frappante : le grenier de l’Égypte, avec ses terres agricoles, se fait progressivement engloutir par une urbanisation incontrôlable.
… et les montagnes du Sinaï avant l’atterrissage
Le désert laisse peu à peu place à la mer Rouge, et le canal de Suez, tel un trait bleu traversant le jaune de la terre, se dessine au loin. Ce vol est une véritable leçon de géographie. À mesure que l’on approche des montagnes du sud du Sinaï, le paysage devient encore plus impressionnant, d’autant plus que nous volons à basse altitude.
Enfin, juste avant l’atterrissage à Sharm el Sheikh, nous apercevons les vastes complexes hôteliers qui se multiplient autour de cette station balnéaire.
Dahab la ville au charme hippie
Nous avions quelques réticences à séjourner sur la mer Rouge, en raison du développement massif qu’elle a connu ces vingt dernières années. La côte est désormais un véritable paradis, ou plutôt un enfer, de resorts « all inclusive », alimentés par des hordes de vols low cost en provenance de l’Europe et, de plus en plus, de Russie.
À l’atterrissage, un Boeing 777 d’Aeroflot attire notre attention, un fait surprenant pour nous étant donné l’absence de ces appareils dans le ciel occidental depuis la guerre en Ukraine.
Eviter Sharm el Sheik et ses resorts à perte de vue !
Nous excluons de séjourner à Sharm el Sheikh, connue pour son tourisme de masse à bas prix et ses nombreux resorts ayant proliféré ces dernières années. La vue du ciel est affligeante.
De l’aéroport, nous prenons directement un taxi pour aller à Dahab, à 90 km au nord.
Une petite pension comme dans les Cyclades
Dahab a conservé un mode de vie alternatif, héritage de son passé hippie des années 70 et 80. Les hôtels y sont de petite taille, peu luxueux, et se situent au sud de la ville, légèrement excentrés. Dans le reste de la ville, on ne retrouve que des pensions de famille ou des hôtels pour routards.
Nous avons choisi de séjourner au SkyRock, une pension intime composée de quelques chambres, avec une architecture rappelant les îles grecques : bâtiments blancs aux fenêtres bleues. La plage se trouve juste en face ; pour y accéder, il nous suffit de traverser un chemin en terre, emprunté principalement par des piétons et de rares voitures.
Masque et tuba pour voir des fonds sous-marins fabuleux
Nous passons une semaine à Dahab, où notre principale activité consiste à faire des sessions de snorkeling (masque et tuba) le long des récifs coralliens.
À notre grande satisfaction, les récifs sont bien préservés et la faune marine y est abondante. Nous explorons plusieurs sites de snorkeling, accessibles à pied, à vélo ou en taxi. Bien que nous soyons fin avril, l’eau reste assez fraîche, entre 21 et 23 °C ; le matin, surtout les jours venteux, nous apprécions de nager avec une fine combinaison. (photo illustrative d’un auteur inconnu)
Le site de snorkeling le plus réputé est le Blue Hole : sa popularité attire souvent des groupes de nageurs peu expérimentés, équipés de bouées et nageant en grappes par peur de s’égarer. C’est néanmoins une attraction de renommée mondiale pour les plongeurs désireux d’explorer un gouffre sous-marin avec un tunnel à 56 mètres de profondeur. Les nombreuses plaques commémoratives de plongeurs disparus témoignent de sa dangerosité.
Même à Dahab les dangers du surtourisme ne sont pas loin
À première vue, on ne peut pas dire qu’il y a trop de touristes à Dahab. Pourtant, nous avons réalisé qu’à un certain endroit, c’est déjà le cas.
Au sud de la ville se trouve Laguna Beach, une jolie plage prisée par les touristes égyptiens. Juste à côté se situe le spot de plongée Napoléon, très populaire et souvent envahi par des excursions guidées en bateau, comme on le voit sur la photo ci-dessous, ce qui a malheureusement endommagé les récifs à cause des nombreux apprentis snorkeleurs qui ont marché sur les coraux ou les ont touchés accidentellement.
C’est là que nous prenons pleinement conscience de la fragilité de la nature. Le surtourisme se manifeste dès qu’un lieu accueille plus de visiteurs qu’il ne peut en absorber, ce qui signifie qu’une simple affluence de quelques centaines de personnes peut suffire à créer des dégâts.
Une ville cool et agréable
Nous apprécions que Dahab ne soit pas un ghetto pour touristes occidentaux aisés. Les visiteurs viennent de divers horizons, et nombreux sont les Égyptiens, qui semblent appartenir à des classes éduquées et libérales.
Dahab s’anime le soir avec ses rues commerçantes, en particulier autour d’un vaste et plaisant quartier piéton.
Les restaurants que nous visitons sont de qualité et bon marché, offrant une grande variété, notamment autour de la pêche. Nous apprécions de ne pas être harcelés, comme nous le serions à Louxor, et de pouvoir faire notre choix à notre rythme.
Le mont Sinaï et le monastère Sainte-Catherine
Après une semaine à Dahab, nous poursuivons notre voyage vers un lieu mythique : le mont Sinaï et le monastère Sainte-Catherine. En partant un matin, ous nous y rendons en une heure et demie de trajet en voiture privée.
Surtout ne pas faire comme tout le monde pour grimper au Mont-Sinaï !
Les habitudes des touristes peuvent parfois être déplorables, car elles suivent aveuglément les injonctions des réseaux sociaux ou des tour-opérateurs.
Ainsi les réseaux sociaux se pâment devant le lever du soleil sur le Mont-Sinaï, un « must ». De nombreux blogueurs, se copiant les uns les autres, vous incitent à monter de nuit au sommet. Résultat : les randonneurs entreprennent l’ascension dans l’obscurité, sans pouvoir apprécier le paysage exceptionnel, pour se retrouver par dizaines à faire leur selfie, en contre-jour, qu’ils postent aussitôt sur Instagram !
Par ailleurs, toutes les agences organisent des excursions d’une journée au monastère Sainte-Catherine depuis Sharm-el-Sheik. L’escapade implique cinq heures de bus aller-retour pour pouvoir à peine visiter, en une heure chrono, un lieu qui est en grande partie fermé aux touristes ! Ce qui lors de notre visite du monastère, devant nos regards amusés, provoquera l’amertume d’un Américain déçu qui s’écrira à sa femme : « never again ! ».
Pour notre part, nous choisissons de faire les choses autrement : nous assisterons au coucher du soleil et non au lever sur le Mont-Sinaï ! Et souhaitant prendre notre temps, nous optons pour une nuit au village de Sainte-Catherine, au Sheikh Mousa Bedouin Camp.
Nous arrivons de Dahab juste à temps pour savourer un déjeuner offert par notre hôte, Mohammed, un Bédouin de la tribu Jabaleya, qui nous accueille avec le thé de l’hospitalité.
Il nous raconte que sa tribu descendrait des Macédoniens envoyés au VIe siècle par l’empereur byzantin Justinien pour protéger le monastère.
Le village de Sainte-Catherine est très austère. Nous préférons rester au camp pour une petite sieste avant l’ascencion du Mont Sinaï. Une voiture nous amène ensuite au monastère situé à 5 km du camp.
L’ascension du Mont-Sinaï au coucher du soleil !
Nous entamons l’ascension du mont Sinaï, qui débute au pied du monastère vers 15 h. La randonnée est très accessible, mais un guide est obligatoire. À cette heure-ci, nous sommes les seuls touristes, et monter en plein jour nous permet de profiter du paysage rocheux spectaculaire qui entoure le monastère.
Nous empruntons le sentier Siket El-Basha, qui serpente en douceur avant d’atteindre la dernière section, où 750 marches sont taillées dans la roche. Les points de vue sont magnifiques, et nous rencontrons de temps à autres des buvettes improvisées.
Nous mettons environ deux heures pour grimper les 715 m de dénivelé et honnêtement nous ne trouvons pas la randonnée difficile.
Culminant à 2 285 mètres, une mosquée et une chapelle ont été construites sur le mont Sinaï en souvenir de l’endroit où Moïse aurait reçu les Dix Commandements de Dieu. En parvenant au sommet, un petit groupe de pèlerins américains termine une prière collective avant de partir, nous laissant seuls pour savourer le calme du lieu.
Nous redescendons ensuite, éclairés par les douces lueurs du coucher de soleil, et arrivons au monastère à la nuit tombée.
Le Monastère Sainte-Catherine
Le lendemain, notre hôte nous conseille d’attendre la fin de la matinée pour visiter le monastère, une fois que les hordes de touristes seront reparties vers Sharm-el-Sheikh. Grâce à ce judicieux conseil, nous le découvrons presque seuls. Cela dit, c’est surtout le site du monastère qui est à explorer, car l’accès est limité à l’entrée de la basilique et au fameux buisson ardent !
La fin du voyage à Ismaïlia et le canal de Suez
Après notre visite du monastère, nous reprenons la route vers Ismaïlia, dernière étape de notre périple égyptien, avant de rentrer en France. Comme pour le trajet vers Marsa Matruh, nous empruntons une route en excellent état absolument déserte !
En quittant les montagnes du sud Sinaï, nous longeons longtemps la mer Rouge. Cette côte, austère et peu accueillante, présente un paysage brut et minéral.
Un canal sous haute surveillance
Après quatre heures de route, nous quittons le Sinaï pour traverser le canal de Suez par un tunnel hautement sécurisé. Nos papiers sont vérifiés et la voiture fouillée de fond en comble. Au cours de tous nos voyages à travers le monde, nous avons rarement été soumis à autant de contrôles policiers qu’en Égypte.
Ismaïlia : la ville de Ferdinand de Lesseps
Ismaïlia, située au bord du lac Timsah, est reliée au célèbre canal de Suez, dont l’importance stratégique pour le commerce maritime mondial est capitale. Notre hôtel, le Mercure de la chaîne Accor, se trouve au bord d’une plage donnant sur le lac. Au loin, nous apercevons quelques-uns des 50 navires qui empruntent quotidiennement cette voie indispensable.
Ismaïlia a été fondée par Ferdinand de Lesseps pour accueillir les bureaux de la compagnie chargée de la construction et de la gestion du canal, à la fin du XIXe siècle. La ville a conservé quelques bâtiments élégants, vestiges de cette époque.
Mais, comme dans de nombreuses villes égyptiennes, l’énorme pression démographique lui confère aujourd’hui un aspect désordonné, avec une succession d’immeubles sans harmonie apparente. Il faut un véritable effort d’imagination pour entrevoir la beauté qu’elle devait posséder autrefois.
Ismaïlia marque ainsi la dernière étape de notre aventure égyptienne avant notre retour en France
C’est l’heure du bilan de notre voyage
Notre voyage a été une réussite : en prenant le temps de rester un peu plus longuement que la durée habituelle des séjours touristiques, nous avons pu véritablement appréhender l’Égypte d’aujourd’hui.
Nous avons ressenti la surpopulation énorme de l’Égypte
En 1981, lors de mon premier voyage en Égypte, le pays comptait 43 millions d’habitants. En 2023, ce chiffre a explosé à 113 millions ! Chaque année, l’Égypte doit accueillir 1,5 million de nouveaux habitants.
Autre statistique frappante : la population se concentre essentiellement le long du Nil et dans le Delta, où vivent 95 % des Égyptiens, sur seulement 5 % du territoire.
Notre voyage nous a permis de saisir cette réalité. Le Caire et Alexandrie suffoquent littéralement, et des soulèvements similaires à ceux de 2011 pourraient se reproduire si l’économie égyptienne venait à subir de nouvelles crises. Nous avons ressenti cette tension sur de nombreuses infrastructures urbaines, notamment au Caire et à Alexandrie.
Siwa et Dahab, bien que plus tranquilles et reculées, se situent dans des régions extrêmement fragiles. Il suffirait de peu — comme une mauvaise gestion des ressources en eau ou une forte immigration interne — pour que ces lieux deviennent difficilement vivables.
L’influence des puissances étrangères est également une question préoccupante. Les énormes investissements émiratis et saoudiens sur la côte méditerranéenne nous ont étonnés, surtout en comparaison avec l’abandon de certains quartiers du Caire.
Enfin, les conséquences des événements tragiques de Gaza, à la frontière égyptienne, pourraient se propager rapidement dans un pays où la religion joue un rôle central.
Nous avons été séduits par son peuple attachant
L’Égypte est un pays attachant. Les Égyptiens, conscients d’être les héritiers d’une civilisation millénaire, nous ont toujours accueillis avec un sens prononcé de l’hospitalité. Le fait d’être souvent en dehors des grands sites touristiques nous a permis de tisser des relations plus naturelles avec eux.
À Siwa, grâce à nos amis Pascale et Sergio, nous avons pu nouer des contacts plus approfondis avec quelques Siwis.
Ce qui distingue l’Égypte, c’est la jeunesse de sa population, un véritable atout pour le pays. Dans le chaos des villes, nous avons perçu une joie de vivre et un dynamisme qui sont inspirants pour l’avenir.
Nous avons aimé le rythme et l’équilibre de notre voyage
Notre voyage nous a offert une vision d’ensemble de l’Égypte actuelle, notamment grâce à la durée de trois semaines, qui nous a permis de l’explorer plus en profondeur que les habituels voyages touristiques.
Les lieux choisis étaient suffisamment variés pour révéler différentes facettes du pays.
Nous avons également savouré de nombreux moments de détente tout au long du séjour, rendant ce voyage agréable sans jamais nous sembler trop long ou trépidant.
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